Mariano Rajoy au soir du 26 juin 2016, au balcon du siège du Parti populaire, rue de Gênes, à Madrid, en compagnie de son épouse, Elvira Fernández (gauche), et de María Dolores de Cospedal, secrétaire générale de la formation (photographie : OK Diario)
En raison de l’utilisation du Stade de France par le championnat d’Europe de football, c’est une fois de plus le Camp Nou de Barcelone qui accueillait la finale du championnat de France de rugby, qui opposait cette année le Racing 92 à Toulon.
Pour l’occasion, plusieurs associations séparatistes largement stipendiées par le pouvoir régional, dont l’Assemblée nationale catalane (sic), l’Òmnium cultural et la Plateforme sportive catalane ont fait imprimer 40 000 « cartes postales » à destination du public français afin de promouvoir leurs visées.
De quoi renforcer l’impression d’une ridicule invasion de la propagande séparatiste dans tous les domaines.
En cette journée de scrutin important pour l’Espagne, c’est le journal de droite Gaceta qui pose la question : y a-t-il de réelles différences de fond entre les quatre grandes formations espagnoles, celles qui ont le plus de chance d’entrer dans la formation d’un gouvernement (Parti populaire, Parti socialiste ouvrier espagnol, Podemos et Citoyens) ?
La réponse est probablement négative. Si nous ne partageons pas les considérations ridiculement libérales de Gaceta, la question posée est pertinente et la réponse l’est plus encore. Globalement, aucun des quatre partis ne propose un référendum sur la question de l’appartenance de l’Espagne à l’Union européenne. Aucun d’entre eux n’est europhobe, ni même eurosceptique, et aucun ne songe à freiner la fuite en avant fédéraliste des institutions européennes. Bien au contraire : chacun déteste à sa manière l’échelon national, qu’il l’avoue (comme dans le cas de Pablo Iglesias) ou pas (comme dans celui de Mariano Rajoy).
Par ailleurs, aucun d’entre eux n’offre une vision alternative de l’histoire de l’Espagne, n’a un plan réellement convaincant pour faire rayonner la culture espagnole à l’international et tous sont d’accord pour céder toujours plus de compétences aux communautés autonomes ou, au moins, pour ne pas remettre en cause le démantèlement toujours plus fort de la nation et de l’État.
Les Espagnols auront donc un choix très limité ce dimanche.
Le roi Alphonse XIII (photographie : Historias de la Historia)
Parmi les épisodes de l’histoire de l’Espagne injustement oubliés, l’attitude de la diplomatie espagnole durant la Première Guerre mondiale (1914-1918) est à souligner tant elle a permis à de nombreux citoyens européens ou américains de garder espoir au milieu du conflit.
Miné par une crise économique profonde et par de graves problèmes sociaux, militaires et logistiques, notre voisin pyrénéen ne peut en effet se permettre d’entrer en guerre, que ce soit aux côtés de la France, du Royaume-Uni et de la Russie (son choix le plus probable) ou des Empires centraux. La population est par ailleurs divisée sur la question, entre aliadófilos (partisans de l’alliance avec Paris, Londres et Moscou) et germanófilos (partisans de l’alliance avec Berlin, Vienne et Istanbul). C’est pourquoi, dès le 7 août 1914, le gouvernement conservateur d’Eduardo Dato déclare sa neutralité dans le conflit, une neutralité qui durera jusqu’à l’armistice de 1918, contrairement au Portugal, à l’Italie et à la Grèce.
Pourtant, la diplomatie espagnole est loin de rester inactive et simple spectatrice dans le conflit. Deux hommes s’illustrent durant ces quatre années par un intense labeur humanitaire en faveur des prisonniers et des populations civiles : Rodrigo de Saavedra y Vinent, marquis de Villalobar, ainsi que le roi Alphonse XIII (1886-1931) lui-même. Le premier est le chef de la délégation diplomatique espagnole à Bruxelles depuis 1913 et il deviendra d’ailleurs ambassadeur d’Espagne sur place après le conflit. Il parvient à éviter la destruction de Louvain par les troupes allemandes, organise un corridor humanitaire entre la Belgique et le Royaume-Uni, permet au petit royaume de continuer à s’approvisionner en nourriture et collabore avec les autorités municipales de Bruxelles et Anvers pour leur éviter de coûteux bombardements. À l’issue de la guerre, le marquis de Villalobar est déclaré citoyen d’honneur des villes de Bruxelles, Anvers, Bruges, Gand et Liège.
De son côté, Alphonse XIII fait installer à ses frais, dans les étages supérieurs du palais royal d’Orient, une Officine pour les Prisonniers, qui coordonne un vaste effort diplomatique pour localiser des prisonniers de guerre ou des disparus, alléger la captivité de certains d’entre eux, etc. Lorsque les citoyens d’Europe et des États-Unis d’Amérique prennent connaissance de ce bureau, de très nombreuses lettres affluent du monde entier vers Madrid pour demander aux services diplomatiques espagnols de sauver ou de retrouver un fils, un mari, un frère, un cousin, etc. Ce sont pas moins de 136 000 prisonniers qui bénéficient de l’aide de Sa Majesté, tandis que 21 000 d’entre eux peuvent être rapatriés et que 70 000 civils sont libérés grâce à l’Espagne. Près de 4 000 visites dans des camps de prisonniers sont réalisées par les diplomates espagnols. Pour ce labeur, le roi d’Espagne est proposé deux fois, sans succès, comme candidat au prix Nobel de la paix (1917 et 1933).
Une infographie réalisée par El País concernant le soutien des différentes couches sociales aux principaux partis espagnols
N’avoir que la défense des plus humbles à la bouche ne suffit pas. Encore faut-il concrètement agir pour eux lorsque l’occasion se présente et obtenir en retour un soutien majoritaire de leur part.
Or, les données publiées par le Centre des Recherches sociologiques (CIS pour Centro de Investigaciones sociológicas) entre janvier et mars 2016 montrent clairement que ce sont les couches les plus aisées de la population qui soutiennent majoritairement Podemos mais également le parti Citoyens, tandis que le Parti populaire et le Parti socialiste ouvrier espagnol recueillent nettement plus de suffrages parmi les plus modestes ou au sein des classes moyennes.
La bourgeoisie se reconnaît donc bien plus largement que le monde ouvrier ou les chômeurs dans la formation de Pablo Iglesias. Sans surprise…
La nouvelle a de quoi surprendre alors que les médias français ne cessent de nous abreuver du « modèle allemand », mais c’est pourtant ce qu’affirme le Reputation Institute dans son dernier classement : l’Espagne jouit d’une meilleure réputation internationale que la toute-puissante Allemagne, et ce en dépit de la crise.
Concrètement, parmi les 55 pays du monde qui disposent de la plus importante richesse globale, notre voisin pyrénéen se classe 17e, juste devant les Allemands, à l’issue d’un grand sondage réalisé auprès des citoyens des pays du G8 (Allemagne, Italie, Russie, Royaume-Uni, Canada, États-Unis d’Amérique, Japon et France) avec 17 critères (qualité des institutions, niveau de développement, qualité de vie, etc.)
L’Espagne, si elle est encore loin du podium (occupé par la Suède, le Canada et la Suisse), améliore son score dans tous les domaines : perception culturelle (+2,5 points), perception de l’environnement politique et institutionnel (+1,8), perception du bien-être social (+1,8) et qualité perçue des produits et services (+1,8 encore une fois).
L’argument contenu dans le slogan séparatiste « L’Espagne nous vole » sous-entend depuis des années que la Catalogne finance largement le reste du pays et tient à bout de bras son économie exsangue. Non seulement les nombres avancés par les indépendantistes sont faussés mais, qui plus est, c’est bien le gouvernement central qui utilise les recettes fiscales issues de l’ensemble du pays pour « sauver » financièrement cette communauté autonome – comme il le doit d’ailleurs au nom de la solidarité nationale.
Depuis sa mise en place en juillet 2012, dans un contexte de grave crise économique et d’asphyxie financière des autonomies, le FLA (Fonds de Liquidité pour les Autonomies) a largement contribué à ce que la Généralité de Catalogne puisse payer ses employés, ses fournisseurs et ses services publics. La région catalane a été, de loin, la première bénéficiaire dudit fonds, avec plusieurs dizaines de milliards d’euros directement reçus depuis Madrid en quatre ans.
Or, la tendance se maintient puisque, pour le second semestre de l’année en cours, la Catalogne a encore reçu 38 % de l’argent distribué par le ministre des Finances en fonction, Cristóbal Montoro, soit 1,43 milliard d’euros. L’Espagne est décidément loin de voler la Catalogne…
Parmi les principaux sujets d’inquiétude et les défis colossaux qui attendent l’Espagne dans les décennies à venir, nous avions déjà noté sur ce blog la problématique de l’instruction publique. La question démographique est cependant aussi brûlante, sinon plus, car un hiver se profil pour le pays dans les années qui viennent, avec une baisse de la natalité, une forte proportion de personnes âgées et dépendantes dans la population totale, toujours moins de femmes en âge de procréer et un système de retraite par répartition qu’il convient de repenser et de sauver.
Or, l’Institut national des Statistiques a publié ce 23 juin un rapport alarmiste à ce sujet expliquant qu’en 2015, le pays avait connu plus de décès que de naissances, une première depuis 1941. L’année dernière, ce sont 419 109 enfants qui sont nés (soit une chute de 2 % par rapport à 2014) tandis que 422 476 personnes sont décédées, soit un solde négatif de 2 753 personnes pour ce qui est de la croissance végétative.
Des chiffres inquiétants dont le monde politique semble globalement se désintéresser en cette période électorale.
Les résultats du référendum britannique du 23 juin concernant la permanence du pays dans l’Union européenne font souffler un vent de panique sur tout le continent, y compris sur l’Espagne, qui est particulièrement touchée par le phénomène.
Les réactions du monde politique ne se sont pas fait attendre et trahissent une grande inquiétude concernant l’avenir des institutions européennes et, plus encore, des relations hispano-britanniques. Lors d’une conférence de presse au palais de La Moncloa, le président du gouvernement en fonction, Mariano Rajoy, a ainsi appelé au calme et à la sérénité, s’adressant notamment aux Espagnols qui résident et travaillent outre-Manche.
De son côté, le secrétaire général de Podemos, Pablo Iglesias, s’est dit attristé par le choix des Britanniques, affirmant que, dans une Europe sociale, une telle catastrophe ne se serait pas produite – il oubliait pourtant que ce sont malheureusement les libéraux qui étaient en pointe du Brexit. Il a demandé aux différents partis actuellement en campagne pour les élections générales de dimanche de ne pas instrumentaliser les résultats du référendum britannique.
Le président du parti Citoyens, Albert Rivera, a pour sa part déploré que « les conservateurs et les populistes » aient amené les Britanniques à choisir la voie de la sortie, pourtant salutaire. Il s’est ainsi posé en défenseur des centristes et des modérés.
Les marchés ont aussi accueilli la nouvelle avec une grande peur et le principal indice boursier espagnol, l’IBEX 35, connaît sa pire journée depuis sa création, avec des pertes allant jusqu’à 12 %. Ce sont particulièrement les valeurs liées au tourisme, au transport et à l’hôtellerie mais aussi au secteur bancaire qui sont touchées. Le consortium IAG, qui regroupe notamment les compagnies aériennes Iberia et British Airways, a ainsi chuté de plus de 23 % au plus fort de la journée.
La Communauté de Madrid, sous l’égide de sa présidente, Cristina Cifuentes, a décidé de rendre hommage à l’un des hommes qui a le plus œuvré pour donner son visage actuel à la ville : l’architecte Antonio Palacios Ramilo (1874-1945). Originaire de Galice, ce génie du bâtiment est l’auteur de quelques-uns des édifices les plus représentatifs et les plus admirables de la capitale : le palais des Communications (aujourd’hui siège de la mairie), l’hôpital des Journaliers de Maudes (où la Communauté a récemment tenu un conseil de gouvernement régional), le Cercle des Beaux-Arts, l’édifice aux Cariatides (qui abrite aujourd’hui le siège de l’Institut Cervantes), l’intérieur des premières stations du métro, etc.
Un vaste programme de visites, conférences et leçons est prévu pour découvrir ou redécouvrir la beauté de l’architecture Art Nouveau, Art Déco et néo-haussmannienne d’Antonio Palacios.